Le monde financier serait-il dirigé par des psychopathes ?
Les personnages clés seraient-ils des psychopathes ? Selon un ancien professeur anglais, cela pourrait expliquer la crise que connaît actuellement le monde.
Alors qu’on annonce que 2012 sera (encore) l’année de la crise de la dette, de l’austérité, bref de la crise économique et financière, de plus en plus de voix s’élevent pour dénoncer le système financier, les marchés qui dirigent le monde. Des marchés souvent accusés de ne pas tenir compte des humains qu’ils broient. C’est ce qui fait dire à Clive R. Boddy, professeur à l’université de Nottingham, que beaucoup des hauts responsables financiers seraient en fait des psychopathes.
Selon ce professeur, cité par Bloomberg, les psychopathes sont des personnes « manquant de conscience, ne ressentant que peu d’émotions et incapables de ressentir sentiments, sympathie ou empathie pour les autres ». Ces personnes se montrent plus froides et calculatrices que les autres et « représentent donc une menace pour les entreprises et la société ».
Mais comment des personnes avec un tel profil psychologique ont-elles pu atteindre des postes si élevés ? Selon Clive Boddy, cela est imputable au monde actuel et à l’organisation des entreprises, avec un personnel qui bouge tout le temps, passe de sociétés en sociétés. Cela permet aux psychopathes de passer inaperçus et de monter rapidement, pouvant même apparaître comme de bons leaders là où, à une autre époque, ils auraient été vite repérés pour leur égocentrisme et leur manque d’éthique.
C’est l’ascension de ce type de profils dans des entreprises financières qui aurait causé la crise, selon le professeur. Car à des postes-clé, ces psychopathes sont dirigés par leur volonté de s’enrichir et de progresser, au détriment de toute responsabilité sociale. Peu importe, pour eux, les dégâts causés.
Ce n’est pas la première fois que des scientifiques mettent en avant le comportement dangereux des employés du monde de la finance. Ainsi, en septembre, une étude suisse affirmait que certains traders avaient des comportements plus dangereux que les psychopathes. 28 d’entre eux avaient été soumis à des tests psychologiques et les résultats avaient été comparés à ceux de 24 psychopathes hospitalisés dans des établissements sécurisés en Allemagne. Il en ressortait que dans un contexte de compétition, les traders étaient prêts à tout pour prendre l’avantage sur leurs concurrents. « Il s’est avéré qu’ils ont eu un comportement plus égocentrique et ont été plus enclins à prendre des risques que le groupe de psychopathes qui ont été soumis aux mêmes tests », expliquait l’un des chercheurs au Spiegel.
Leur presse (RTBF.be), 5 janvier 2012.
Les traders seraient plus fous que les psychopathes
Une étude suisse tente de comprendre comment des traders peuvent parier des milliards sur les marchés financiers dans le cadre d’opérations frauduleuses.
Alors que la banque helvétique UBS est empêtrée dans une affaire de fraude, une étude menée en Suisse révèle que certains traders auraient un comportement plus dangereux et manipulateur que des psychopathes. Dans le cadre d’une thèse préparée à l’école de management de l’Université de Saint-Gall, et dont Lefigaro.fr a eu la copie, Pascal Scherrer, un expert légiste, et Thomas Noll, l’un des administrateurs de la prison de Pöschwies au nord de Zurich, ont planché sur le profil de ces jeunes traders capables de miser des milliards d’euros sur les marchés financiers dans le cadre d’opérations frauduleuses.
Pour ce faire, ils ont soumis un groupe de 28 investisseurs professionnels issus de plateformes de trading sur produits dérivés, le forex et de capital investissement — à des tests d’intelligence et des simulations informatiques afin d’évaluer leur aptitude à coopérer et leur degré d’individualisme. Ont été également passés au crible leur capacité à se rebeller, leur désir de pouvoir, leur immunité au stress et à la peur. Les résultats ont été comparés à ceux d’une étude conduite auprès de 24 psychopathes hospitalisés dans des établissements hautement sécurisés en Allemagne.
Cette méthode n’est pas nouvelle. En 2004, déjà, la revue New Scientist comparait les employés désireux de grimper l’échelle hiérarchique de leur entreprise avec des psychopathes, à cause de leur manque d’empathie et de compassion dans un environnement de stress. « Évidemment, on ne peut pas dire que tous les traders sont dérangés », nuance Thomas Noll au journal allemand Spiegel. « Mais il s’est avéré qu’ils ont eu un comportement plus égocentrique et ont été plus enclins à prendre des risques que le groupe de psychopathes qui ont été soumis aux mêmes tests. »
Écraser leurs adversaires
Selon les chercheurs, le moteur principal des traders n’est pas de dégager les gains les plus importants, mais de prendre l’avantage sur leurs concurrents. Dans un contexte de compétition, ils abandonnent toute approche réfléchie et stratégique de l’investissement dans le seul but d’écraser leurs adversaires. Et ce, quoi qu’il en coûte ! Pour la Société générale, la facture laissée par Jérôme Kerviel en 2010 a atteint 4,9 milliards d’euros. À la City de Londres, le jeune trader Kweku Adoboli a fait perdre 2,3 milliards de dollars à UBS il ya deux semaines.
« Dans 99 % des cas de fraude, il faut savoir qu’il n’y a pas d’enrichissement personnel direct », souligne pour sa part Frédéric Boulier, expert chez NICE Actimize, spécialiste de la fraude financière. « Les traders sont parfois victimes d’un emballement des pertes dû à l’envie de “se refaire”, selon le jargon. » Et là, tous les paris sont bons. Interrogé sur la BBC lundi, Alessio Rastani, qui se présentait comme un trader indépendant de Londres, a créé le buzz sur Internet en avouant sans complexe : « La récession, c’est une opportunité pour nous. Je vais au lit tous les soirs en rêvant d’une nouvelle récession. » Au final, selon le Daily Telegraph, cette sortie choc n’aurait été qu’un coup de bluff. Le trader ne serait qu’un boursicoteur.
Leur presse (Isabelle de Foucaud, LeFigaro.fr), 28 septembre 2011.
Des réserves avec le langage de la psychiatrisation, qui demeure celui de nos adversaires : le terme de « psychopathologie » invite à ne voir dans la domination une espèce de folie surgie d’on ne sait où, quand ce que ce terme recouvre ne désigne somme toute qu’une des nombreuses conséquences d’un système (anti-)social qui bouffe les rapports humains.
Néanmoins pour poursuivre la réflexion sur la « psychopathologie » du dirigeant, on pourra lire avec plaisir cet article de Derrick Jensen, « psychopathologie de la culture dominante » : http://derrickjensenfr.blogspot.com/2011/07/psychopathologie-de-la-culture.html