Le 21 juin 2008, Salem Souli, un sans-papiers enfermé au centre de rétention de Vincennes, meurt faute de soin. Le lendemain une révolte éclate qui réduit en cendres la plus grande prison pour sans-papiers de France. Cette révolte fait suite à plusieurs mois de lutte à l’intérieur (grèves de la faim, refus d’être comptés, manifestations, départs de feu…). Par la suite, 10 personnes parmi les 270 retenues dans le centre au moment de l’incendie sont arrêtées et emprisonnées pendant plusieurs mois avant d’être jugées. Elles sont condamnées en mars 2010 à des peines allant de 8 mois à 3 ans de prison ferme. Elles font alors appel de cette décision. Un nouveau procès aura lieu à partir du jeudi 6 octobre 2011. En attendant, leur liberté est à la merci de la machine judiciaire.
En première instance, le procès s’est déroulé entre personnes de connivence, juges, avocats de l’État, procureur. Toutes les demandes d’informations complémentaires ayant été rejetées, les avocats des mis en examen ont estimé que les droits de la défense n’étaient pas garantis et se sont retirés. Là encore, lors des audiences préliminaires du procès en appel, la majeure partie de ces demandes, telles celle concernant la mort de Salem Souli, ont été refusées.
Sans doute s’agit-il de faire payer cette petite bouffée d’air grâce à laquelle, durant l’été 2008, plusieurs centaines de personnes sans-papiers ont échappé à l’expulsion et à l’enfermement. En effet 280 places de rétention en moins c’est concrètement moins de rafles et d’arrestations.
Pour expulser toujours plus, l’État a besoin de toujours plus de places en centre de rétention : au début des années 2000, un programme de construction de nouveaux centres partout en France a permis de multiplier le nombre de places. Ainsi, le 1er août dernier a ouvert au Mesnil-Amelot le plus grand centre de rétention de France, où 240 personnes pourront être enfermées. Avec ce programme de construction, l’État s’est donné les moyens d’allonger la durée d’enfermement : avec la loi Besson entrée en vigueur en juillet 2011, le temps de rétention est passé de 32 à 45 jours, ce qui laisse plus de temps aux préfectures pour organiser les expulsions ; plus de temps à attendre, enfermé, puni pour ne pas avoir les bons papiers.
Mais l’incendie du centre de Vincennes n’est pas un cas isolé ni exceptionnel. Entre les murs de ces centres ont lieu chaque jour des actes de résistances individuels ou collectifs, des révoltes, qui parviennent parfois à entraver la bonne marche des expulsions. Ainsi, en mars 2011, le centre de rétention du Canet à Marseille a partiellement brûlé et est resté fermé pendant plusieurs mois. En juillet dernier, 5 départs de feu simultanés se sont déclarés au centre de Lyon Saint-Exupéry, entraînant sa fermeture.
Pour chacune des révoltes nuisant à l’un des rouages de la machine à expulser, l’État doit trouver des coupables. Ainsi à Bordeaux, 2 personnes purgent une peine de 3 et 5 ans, à Marseille, 4 personnes ont été incarcérées et à Lyon, 4 personnes sont actuellement en attente de leurs procès derrière les barreaux.
Pour tenter d’endiguer ces révoltes, l’architecture des nouveaux centres a été conçue pour faciliter l’isolement et la surveillance des personnes enfermées (petites unités, nombreuses caméras…). Mais quelle que soit la forme que prend la prison, la volonté de ceux et celles qui y sont enfermés sera toujours d’en sortir.
Le procès en appel de l’incendie du centre de rétention de Vincennes aura donc lieu tous les jeudis et vendredis après-midi du 6 octobre au 4 novembre 2011 (Cour d’appel de Paris, Pôle 2, chambre 9).
Ce procès sera sans doute anodin pour la justice mais, les personnes qui comparaîtront y risqueront, elles, leur liberté. Pour nous, ce doit être l’occasion de montrer notre solidarité, mais aussi de rappeler le rôle des centres de rétention, des frontières, des prisons, et la nécessité de les faire disparaître.
Relaxe des inculpés !
Fermeture des centres de rétention !
Liberté pour tous et toutes !
Collectif de solidarité avec les inculpés de Vincennes (contact)