Tunisie : journée de colère anti-gouvernement, heurts avec la police
De nouvelles manifestations contre le gouvernement provisoire tunisien ont eu lieu lundi, la police dispersant avec du gaz lacrymogène des manifestants dans le centre de la capitale, dont certains exigeaient la démission de l’équipe gouvernementale.
Une autre manifestation anti-gouvernementale s’est déroulée sans incident devant le Palais de Justice, pas loin de la Kasbah, qui avait abrité de longs sit-in dans la foulée de la chute du régime de Ben Ali, le 14 janvier. Une marche syndicale autorisée a également eu lieu dans la capitale.
Quels que soient l’endroit, les protestataires ont exprimé leur colère contre les autorités de transition, certains appelant à la chute du gouvernement de Béji Caïd Essebsi.
La police a fait usage de gaz lacrymogène pour disperser une manifestation au cœur de Tunis, au moment où la marche de protestation autorisée rassemblait sans incident quelque 2.000 Tunisiens à l’appel de l’Union générale tunisienne de travail (UGTT, centrale syndicale unique sous Ben Ali).
La police anti-émeute a encore chargé des manifestants qui tentaient de se regrouper sur l’Avenue de Carthage, dans le centre de la capitale, dans l’après-midi.
Le porte-parole du ministère de l’Intérieur Mohamed Hichem Meddeb a indiqué à l’AFP que la police avait chargé « lorsqu’un des manifestants a jeté une bombe lacrymogène en leur direction ».
Les premiers protestataires qui avaient commencé à se rassembler en fin de matinée sur l’artère centrale Habib Bourguiba ont été empêchés de progresser vers le ministère de l’Intérieur, une dizaine de blindés de la police barrant la voie.
Des colonnes de fumée s’étaient élevées de la place Ibn Khaldoun, devant la cathédrale jusqu’à la porte de France, à l’entrée de la Médina, alors que des manifestants criaient « nouvelle révolution », « ministère de l’Intérieur terroriste », « le peuple veut la chute du système », « fidèles à l’âme de nos martyrs ».
Repoussés sur la place d’accès à la Médina, des jeunes manifestants se sont heurtés à la police jetant des projectiles de toutes sortes. Des commerçants et marchands ambulants ont rapidement déserté les lieux.
En revanche, la marche pacifique à l’appel de l’UGTT sous le slogan : « fidèles aux âmes des martyrs et pour la réalisation des objectifs de la révolution » s’est déroulée sans incident.
Quelque 2.000 personnes, selon la police, ont défilé sur l’artère Mohamed V, encadrées par un important dispositif policier.
Les protestataires ont crié « Indépendance à la justice », « purge des magistrats et avocats corrompus », « Tunisie libre, les voleurs dehors ».
« Le peuple veut le départ du gouvernement », « Le peuple ne doit plus être humilié », ont-il scandé, dénonçant le gouvernement de transition et la cherté du coût de la vie en plein ramadan.
Des représentants du parti islamiste Ennahda et d’autres formations politiques ont participé à cette marche de l’UGTT y compris d’anciens membres du gouvernement de transition.
« Il est capital que la magistrature soit indépendante, nous devons résoudre nos problèmes pour réussir l’élection » d’une élection constituante le 23 octobre, a déclaré à l’AFP l’ancien ministre des Transports Yassine Brahim qui a intégré un nouveau parti politique.
Lors du soulèvement du 14 janvier qui balayé le régime de Ben Ali après 23 ans de pouvoir sans partage, l’UGTT avait joué un rôle de premier plan. Certains de ses dirigeants se sont joints brièvement au gouvernement de transition, mais la centrale se pose désormais en gardien contre « toute récupération du mouvement révolutionnaire ».
Leur presse (Agence Faut Payer), 16 août 2011.
Tunisie, la manifestation de l’UGTT tourne aux affrontements avec la police
Plusieurs manifestations ont démarré ce matin du centre-ville de Tunis, pour se rejoindre à midi à l’avenue Habib Bourguiba. Celle organisée par l’Union Générale des Travailleurs Tunisiens (UGTT) a pris comme point de départ, la place Mohamed Ali en compagnie de partis tels que Ennahdha. Une autre manifestation qui rassemble les avocats et juges avec quelques partis comme le PCOT, a pris son départ à Bab Bnet, devant le palais de la justice. Un troisième groupe est sorti de la Place d’Afrique à l’Avenue Mohamed 5, avec entre autres, Ettakattol, et Afek Tounes. A midi, alors que ce dernier groupe prenait à peine son départ, les autres étaient déjà arrivés sur l’avenue Habib Bourguiba, du côté de la porte de France.
Les slogans qu’ils brandissaient dénonçaient la justice de deux poids deux mesures, exigeaient une justice indépendante et impartiale, et réclamaient justice pour les martyrs de la révolution ainsi que la chute du régime. Plusieurs centaines de manifestants s’étaient rassemblés criant leurs revendications, quand un gaz lacrymogène a été lancé au milieu de la foule. « On a vu des tirs de pierres vers le siège du ministère de l’Intérieur. C’est pour ça que la police a riposté », a dit un manifestant qui prenait la fuite par la rue du Caire. Dans la foulée, d’autres tirs de gaz se sont élevés sur toute l’avenue Habib Bourguiba et la police s’est faite de plus en plus présente. Des agents de la circulation aux agents d’intervention rapide y compris la brigade anti émeutes, sillonnaient l’avenue et intimaient l’ordre aux manifestants de vider les lieux. Les manifestants n’ont pas longtemps résisté. Les foules se sont dispersées dans un grand mouvement de panique où plusieurs personnes avaient eu des malaises à cause des émanations de gaz.
Les évènements se sont très vite succédé, les magasins des rues adjacentes ont presque tous baissé leurs stores, et les commerçants pontois scrutaient l’horizon. « Il y en a marre de ces histoires. Ce sont les gamins des rues qui font la loi maintenant ? Il ne faut pas que la police recule. Il faut remettre un peu d’ordre », crie le tenancier d’un magasin de vêtements. De l’autre côté du boulevard, une bande de jeunes se met à casser la devanture d’une banque. La police rapplique en moto et en camions, les bombes lacrymogènes fusent, et les jeunes se rabattent du côté de rue de Rome, où ils continuent à lancer des pierres vers les agents de l’ordre.
Quelques temps plus tard, l’attaché de presse du ministère de l’Intérieur, contacté par une radio locale, dit que la première bombe lacrymogène avait été lancée par un manifestant. « Des bombes qui ont été subtilisées durant les évènements, ce qui a provoqué la colère de la foule qui a commencé à attaquer la police. »
Au même moment, à la place Barcelone, et en plein milieu des heurts, un homme saute du 4e étage d’un immeuble. Il est mort sur le coup. Ils souffriraient de troubles mentaux. (sic)
Solidarité ouvrière, 16 août 2011.
Série de manifestations antigouvernementales en Tunisie
Une série de manifestations antigouvernementales ont réuni lundi des milliers de personnes en Tunisie pour réclamer la démission du gouvernement intérimaire accusé de laxisme envers les dirigeants de l’ancien régime Ben Ali.
Dans la capitale, les forces de sécurité ont dispersé les manifestants à coups de matraque et de gaz lacrymogène.
Plusieurs centaines de personnes tentaient de se rassembler devant le siège du ministère de l’Intérieur, sur l’avenue Bourguiba dans le centre-ville, lorsque la police est intervenue, a rapporté un journaliste de Reuters.
La Tunisie s’est soulevée en janvier contre le président Zine ben Ali, contraint de fuir le pays pour se réfugier en Arabie saoudite. Ce mouvement de contestation a lancé la vague du « printemps arabe », qui a également chassé du pouvoir le président égyptien Hosni Moubarak et a ébranlé le régime en Syrie et au Yémen.
« Il nous faut une nouvelle révolution car rien n’a changé », a déclaré un manifestant à Tunis, Mounir Troudi. « Il faut que le gouvernement s’en aille, et tout de suite ».
« Regardez l’Égypte. Moubarak se retrouve devant la justice avec ses fils et les symboles de son régime », a ajouté une manifestante, Meriam Nafti. « Pourquoi donc en Tunisie, d’où est partie la révolution, de telles choses ne se produisent-elles pas ? »
« Ben Ali est en Arabie saoudite et son clan est toujours ici ! », ont scandé des manifestants devant le ministère de l’Intérieur.
Une manifestation a également rassemblé un millier de personnes à Sfax, à 250 km au sud de la capitale, pour demander la démission du Premier ministre Béji Caïd Essebsi et de son gouvernement.
Des habitants de Sidi Bouzid, la petite localité du Centre-Ouest d’où est partie « la révolution de jasmin » après l’immolation par le feu en décembre d’un jeune chômeur diplômé, ont fait état d’un rassemblement de protestation devant le palais de justice.
« Personne ne peut se taire face à cette parodie de justice », a déclaré à Reuters par téléphone Mahdi Horchani, qui a participé à la manifestation de Sidi Bouzid. « Il faut établir la justice dans ce pays ».
Des vidéos mises en ligne sur Facebook montrent d’importantes manifestations dans d’autres villes de Tunisie, dont Bizerte et Beja dans le Nord, Monastir, la ville natale de Habib Bourguiba, sur la côte Est, et sur l’île de Djerba, dans le Sud frontalier de la Libye.
Leur presse (Reuters), 15 août 2011.