[Sénégal] Émeutes contre les coupures de courant / Le pouvoir recule face aux émeutiers

Au Sénégal, l’été sera chaud
Dakar et sa banlieue théâtre de nombreux incendies

Depuis jeudi, et la forte mobilisation face au très controversé projet de loi d’Abdoulaye Wade qui a rapidement viré à l’émeute dans le centre-ville de Dakar, les violences continuent. Excédées par les coupures de courant, de plus en plus longues et de plus en plus fréquentes, les populations se sont principalement attaquées, lundi, aux locaux de la société publique d’électricité.

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Dakar et sa banlieue en flammes ! Lundi, des bâtiments publics, des mairies et des locaux de la Senelec, la société publique d’électricité, ont été saccagés et incendiés par des jeunes en colère. Ce nouvel embrasement du pays intervient seulement quatre jours après une précédente journée de violences, jeudi. Face au projet de réforme constitutionnelle d’Abdoulaye Wade visant à se faire réélire l’année prochaine en compagnie d’un vice-président pouvant lui succéder avec seulement 25% des voix, des milliers de Sénégalais avaient fait le siège de l’Assemblée nationale pour réclamer le retrait du projet. La contestation avait rapidement tourné à l’émeute, faisant une centaine de blessés dont 13 policiers.

Malgré l’abandon du projet de loi par le président Wade, la température ne retombe pas. Et la contestation à caractère politique légitime a laissé place au vandalisme et au pillage. En proie à des coupures régulières d’électricité depuis des mois, qui se sont aggravées ces dernières semaines, durant parfois jusqu’à 24 heures d’affilée dans certains quartiers, les Sénégalais sont à cran. Il n’en fallait pas plus que de longs délestages ce lundi pour rallumer la mèche. Les barrages de fortune faits de pierres ou de pneus enflammés se sont répandus dans la ville comme une traînée de poudre. Une éruption brutale à la mesure de la frustration des Sénégalais.

Des agences de la Senelec et des bâtiments publics incendiés

Lundi soir à Dakar, les agences de la Senelec étaient en feu dans le quartier de la Patte d’Oie ainsi qu’à Ouakam. Des locaux de la société d’électricité ont également été incendiés dans la banlieue à Yeumbeul, à Daroukhane et aux Parcelles assainies. La mairie des Parcelles a également fait les frais du ras-le-bol des Sénégalais. Dans la banlieue de Guédiawaye, c’est le siège des services fiscaux qui a été totalement saccagé et incendié. D’après la police, les pillards n’auraient évidemment rien laissé sur place et surtout pas le coffre-fort. Un déferlement de violences qui a eu lieu un peu partout dans la capitale et sa banlieue obligeant en plusieurs endroits, les forces de l’ordre à intervenir et à disperser les manifestants à coup de gaz lacrymogènes.

Plus tôt dans la journée, une violente manifestation avait éclaté à Mbour, à 80 km au sud de la capitale, plongée dans le noir depuis deux jours. Des forces de l’ordre sont intervenues pour les disperser à coups de grenades lacrymogènes. Les protestataires se sont alors disséminés dans différents quartiers de la ville, bloquant des voies, brûlant des pneus, et saccageant les locaux de la Sénelec.

L’armée en renfort

Dans le quartier de Yoff à Dakar, c’est carrément le domicile d’Oumou Khairy Guèye Seck, ministre de l’élevage, qui a été attaqué par les manifestants lundi soir. Même chose dans le quartier des Maristes où la maison de Serigne Mbacké Ndiaye, porte-parole du gouvernement, a été incendiée. Les forces de police n’étant plus en mesure de contenir la situation, les autorités ont eu recours à l’armée pour protéger des sites stratégiques et les domiciles de certaines personnalités de l’État face à cette flambée de violence. Des jeunes étaient alors en route vers le monument de la Renaissance africaine et vers le siège du parti au pouvoir.

Ce n’est certes pas la première fois que les Sénégalais descendent dans la rue et saccagent des agences de la compagnie publique d’électricité pour protester contre les coupures de courant, un problème qui empire d’année en année. Mais, jamais autant de foyers de contestation se sont allumés en même temps. Dans la ligne de mire, le ministre de l’Energie, qui n’est autre que Karim Wade, a du souci à se faire. Depuis plusieurs jours, les appels à Abdoulaye Wade se multiplient afin qu’il renonce à se présenter à la prochaine élection présidentielle, prévue en février. De son côté, le président, qui ne s’est toujours pas exprimé depuis les évènements de jeudi poursuit ses consultations. Il a ainsi convié au Palais de la République ses proches collaborateurs vendredi, ses alliés de la coalition « Sopi pour toujours » samedi, et le comité directeur de son parti dimanche. Dans un communiqué, ce dernier estime que « l’intention de certains des organisateurs de ces manifestations de jeudi dernier était de déstabiliser le pays et de l’installer dans la violence ». Le comité directeur du Parti démocratique sénégalais prévient qu’il « veillera au strict respect du calendrier républicain qui sera poursuivi jusqu’à son terme ». Le bras de fer engagé entre le régime et une partie de la population risque de durer, les violences aussi.

Leur presse (Simon Maro, Afrik.com), 28 juin 2011.

 

Nouvelles manifestations violentes après celles du « 23 juin » : La rue contre la loi des délestages

La capitale du Sénégal, a renoué hier, avec les manifestations contre les coupures intempestives d’électricité. Dans les différents quartiers de la capitale, la nuit a été mouvementée, avec des manifestants très remontés contre les délestages, et qui ont entrepris de saccager les édifices publics et les bureaux de la Senelec.

Faute d’être dans le réseau, l’électricité était hier dans l’air. Des jeunes ont encore mis le feu sur Dakar, hier. Sacré-Cœur 3, Sicap-Liberté 1, 2, 3, Médina, Grand-Dakar, ou les Parce­lles Assainies, entre autres, ont été transformés en théâtre de contestation par des groupes de jeunes frustrés par le manque de courant. Armés de pierres, les manifestants ont pris d’assaut la Voie de dégagement nord (Vdn), à hauteur du terrain de football et les principales artères de Sicap-Liberté. Surexcités, ils ont dressé des barrières, en brûlant des pneus. Les nuages de fumée noire s’apercevaient de loin. Automobilistes, piétons, sportifs étaient contraints de rebrousser chemin. Car au-delà des flammes, des pierres jaillissaient de partout.

Quelques minutes après le début des échauffourées, environ 16 véhicules de la Légion de gendarmerie d’intervention (Lgi) font irruption sur la Vdn. Quelques minutes suffisent aux gendarmes, armés de lance-grenades, pour disperser la foule. Pollué par le gaz des grenades lacrymogènes, l’air ambiant dans cette zone est irrespirable.

Les populations broient du noir

Si les gendarmes réussissent à disperser la foule sur la Vdn, à Li­berté 3 ce n’est pas le cas. Par petits groupes, les jeunes dictent leur loi. Il est très difficile pour les policiers à bord de pick-up, de dissuader les manifestants. En effet, les limiers sont en nombre très limité.

Aucune casse n’est signalisée à travers ces artères. Les protestataires se sont simplement contentés de barrer la chaussée pour exprimer leur colère.

Depuis vendredi, les coupures d’électricité ont repris de plus belle. Avec le ronronnement des groupes électrogènes, la capitale sénégalaise est replongée dans une pollution sonore. Le fameux planning que la Senelec publiait dans la presse semble rangé dans les tiroirs. Le courant est coupé n’importe quand et n’importe comment, comme à l’accoutumée. Dans tous les quartiers de Dakar, les populations broient du noir, alors que la chaleur ambiante les pousse hors des domiciles.

Faute d’électricité, toutes les activités sont au ralenti. Des artisans se tournent les pouces. Seuls quelques rares coiffeurs, soudeurs métalliques dotés de groupe électrogène peuvent encore travailler. Abdou Khadre Diagne, couturier sur la route du cimetière de Yoff témoigne : « Les délestages durent des heures et des heures quotidiennement. Cela affecte négativement notre travail. » Le visage dégoulinant de sueur, le jeune tailleur déplore le grand préjudice que causent les coupures de courant. « Depuis des mois, nous n’arrivons plus à travailler correctement. Pis, nous perdons nos machines du fait de l’interruption inopinée de l’électricité. Et la Senelec ne dédommage personne. Nous ne savons plus à quel saint nous vouer. » Sans être invité au débat, son collègue Modou Ndiaye embraie : « Quotidiennement, nous payons plus de 50’000 francs Cfa pour faire fonctionner le groupe électrogène. Et malgré tout la facture d’électricité demeure salée. Nous en avons vraiment marre. »

Le plan d’urgence Takkal lancé par Karim Wade, ministre de l’Éner­gie et par les responsables de Sene­lec refuse toujours de s’allumer.

Leur presse (Dialigué Faye, Le Quotidien), 28 juin 2011.

 

Manifestation contre les délestages : Plusieurs agences de la Sénélec mises à sac

Des scènes de rue assez violentes ont eu lieu hier dans l’après-midi jusqu’en début de soirée dans divers quartiers de la ville et en banlieue, à Ouakam et à Guédiawaye, ainsi que dans des villes comme Mbour. De la Sicap à Mermoz, sur la Voie de dégagement nord (Vdn)  bloquée pendant quelques heures à hauteur du « tableau Sde », à Yeumbeul où la Route de Malika était coupée, les usagers ont dû prendre leur mal en patience ou aller à pied. Pis, dans plusieurs endroits, des foules de jeunes surexcités, qui réclamaient avec véhémence l’arrêt des coupures intempestives d’électricité, ont saccagé des agences de la Senelec (Mbour, Yeumbeul et Yoff) venant ainsi allonger la liste de ces actes déplorables contre la société qui n’arrive plus à garantir une fourniture correcte de courant.

Les manifestants ont d’abord investi le quartier Sacré Cœur à hauteur de la « Boulangerie jaune ». Une véritable Intifada s’est alors installée vers 18 heures sur les lieux. Le spectacle qui s’offrait à la vue des passants était désolant. Des pneus brûlés jonchaient le sol, de même que plusieurs cailloux. Du côté du rond-point de la Sicap Liberté 5, on pouvait apercevoir un épais nuage de fumée. Les forces de Police, armés d’uniformes adaptés à la situation, casquettes anti-émeute vissées sur le chef, pouvaient ainsi aller à l’assaut des jeunes manifestants pour tuer dans l’œuf les velléités guerrières des jeunes Sicapois, outrés par les coupures intempestives d’électricité.

Interrogé, Mb. F, un jeune manifestant, estime que « la coupe est pleine à la Sicap Sacré Cœur où les gens sont restés près de 24 heures sans électricité ». « C’est une situation intenable », peste-t-il. Les forces de Police ont tenté tant bien que mal de contenir des jeunes déchaînés en usant de façon sporadique à des jets de grenades lacrymogènes.  Une stratégie de musellement qui n’a guère payé, car les jeunes manifestants se sont terrés dans leurs domiciles avant de repartir à l’assaut quelques minutes plus tard : un véritable jeu du chat et de la souris.

À Liberté 6 Extension, le spectacle est le même : les véhicules sont déviés et ne pouvaient emprunter la Vdn, apeurés par des manifestants en furie. Toujours sur la Vdn, du côté du siège du Pds, la Police est restée en état d’alerte. Profitant de l’obscurité qui commençait à s’installer après 19 heures, les jeunes manifestants ont procédé à des jets de pierres sur les lieux. Les jets de grenades lacrymogènes, combinés à des renforts d’autres éléments des forces de sécurité ont eu finalement raison de la témérité de ces jeunes en colère. Une folle après-midi qui n’augure rien de bon si les délestages continuent.

Leur presse (M. L. Diatta, Le Soleil), 28 juin 2011.

 

Émeutes de l’électricité : Le courant ne passe plus entre Wade et le peuple

Les émeutes contre les coupures intempestives d’électricité ont été d’une rare intensité, hier. Les jeunes en furie contre la distribution irrégulière de l’électricité, surtout ces trois derniers jours, ont mis à sac plusieurs édifices publics, dont la mairie des Parcelles assainies, celle de Yeumbeul, l’agence Senelec de Yoff, celle des Impôts et domaines de la Patte d’Oie. Ils ont aussi brûlé plusieurs véhicules.

Yeumbeul Nord, Médina, Liberté 6, Liberté 5, les Sicap, Sacré-Cœur, Parcelles assainies, Grand Médina, Vdn, Niarry Tally ont été, sans conteste, les points les plus chauds de la manifestation contre les délestages qui pourrissent la vie des citoyens sénégalais. Les jeunes en colère contre les coupures de courant, particulièrement longues de ces trois derniers jours, ont envahi les rues et les ruelles de ces quartiers dès les premières heures de l’après-midi. Pendant six heures d’horloge, c’est-à-dire, de 15h à 21h passées, les jeunes manifestants ont occupé la rue dans ces quartiers. Particulièrement organisés et armés, ils ont rendu la vie dure aux policiers qui, malgré les moyens matériels et humains, ont été dépassés par la situation quasi insurrectionnelle qui a régné dans la capitale, hier. Ainsi, par endroits, ils ont érigé des barricades dans les rues à l’aide de poteaux électriques endommagés, de gravats, de poubelles. Tantôt, ils ont allumé des braisiers à l’aide de tronc d’arbres et de pneus usés rendant la circulation impraticable dans toute la capitale.

Mieux ou pire, les manifestants ont brûlé des véhicules et saccagé plusieurs édifices publics en divers endroits de la ville. On dénombre plusieurs véhicules brulés dont un minibus Tata, un véhicule de la Senelec de Yoff et des voitures de la mairie des Parcelles assainies. La mairie de cette localité située dans la populeuse banlieue dakaroise a été mise à sac et tout le mobilier emporté ou laissé à la proie des flammes. C’est le même sort que les manifestants de Yeumbeul Nord, situé dans la lointaine banlieue dakaroise, ont fait subir à la mairie de leur localité. Dans celle-ci, les jeunes émeutiers ont emporté avec eux même les portes et fenêtres. À l’agence Senelec de Yoff, les jeunes manifestants de cette localité ont mis le feu à l’édifice. Avant de quitter les lieux, ils ont mis le feu à un véhicule. Tout comme à l’agence des Impôts et des Domaines des Parcelles assainies où tout a été volé ou brûlé.

Le bilan des dégâts occasionnés par les manifestaions contre les interminables coupures d’électricité se serait aggravé si les émeutiers des quartiers riverains du siège du Parti démocratique sénégalais (Pds), sis sur la Vdn, étaient arrivés à leur fin qui était de mettre à sac le bâtiment dont une des façades est entièrement en vitres. Malgré de multiples tentatives, ils se sont heurté à une farouche résistance des forces de l’ordre qui avaient installé tout autour un dispositif impressionnant de policiers.

Policiers en infériorité numérique

Par contre, dans les autres quartiers, les policiers étaient manifestement en infériorité numérique. Sauf quand la situation devenait extrêmement grave, des renforts étaient dépêchés à bord des voitures pick-up de la police. Ainsi, jusque tard dans la soirée d’hier et dans la pénombre puisqu’il n’y avait pas d’électricité, les manifestants et les policiers se sont livrés à des courses-poursuites dans les ruelles des quartiers. Aux jets de pierres des jeunes émeutiers, les policiers ont répliqué avec leurs gaz lacrymogènes.

Chose rare, à côté des policiers en tenue, il y avait autant de policiers en civil encagoulés, armés de lance-grenades. De fait, les forces policières, fortement mobilisées et armées jusqu’aux dents comme lors des manifestations du 23 juin dernier, n’ont fait que charger les émeutiers particulièrement mobiles à coups de gaz lacrymogènes. D’ailleurs, ces projectiles ont atteint grièvement à l’œil un manifestant aux Parcelles assainies. Des arrestations de manifestants ont également été notées dans divers quartiers de la capitale. Les habitants des quartiers, théâtres des émeutes, ont vécu également un sale quart d’heure. Pour cause, dans leur riposte offensive, les policiers ont jeté des grenades lacrymogènes jusqu’à l’intérieur de certains domiciles de citoyens.

Leur presse (Mamadou Sarr, Walf Fadjri), 28 juin 2011.

 

Pillage des Impôts et domaines, agences Senelec, domiciles de ministre, mairies : la razzia de la furie des jeunes

Les conséquences des émeutes ou guérilla urbaine de l’électricité sont énormes. Les jeunes n’ont rien épargné dans leur furie. Des édifices publics, municipaux et des domiciles d’autorités tout a été saccagé, détruit et mis à sac. Les locaux des impôts et domaines de Mbour et de Pikine-Guédiawaye, les agences Senelec de Yeumbeul, Ouakam, Patte d’oie, Guédiawaye et certains domiciles de ministres sont attaqués et vandalisés.

Les dégâts sont énormes des émeutes des jeunes contre les longues et récurrentes coupures d’électricité. Durant toute la soirée d’hier, lundi 27 juin la capitale sénégalaise et sa banlieue sont en feu. Des rues barrées, des pneus, troncs d’arbres, des ordures et autres sont brûlés en plein milieu des chaussées. Des véhicules sont cassés. Les forces de l’ordre sont intervenues mais elles ont été débordées par les manifestations.

Les édifices saccagés se comptent par dizaines. De Mbour en passant par Malika, Yeumbeul, Guédiawaye, Patte d’oie, Yoff et Ouakam. En effet, à Mbour, les jeunes ont pris à partie les locaux des impôts et domaines et l’agence Senelec de la localité qu’ils ont pillés. Des papiers et des ordinateurs sont sortis et brûlés dans la rue.

Même cas de figure à Malika où la mairie et la maison des femmes sont aussi saccagées. Les jeunes en furie n’ont rien laissé sur les lieux. À quelques kilomètres à Yeumbeul, les jeunes ont détruit à l’agence Senelec de la localité. Ils ont mis en minorité les policiers et ont assiégé les rues, la Senelec et tout à fait début le poste police où une arme et des casques anti émeutes ont été confisqués par les assaillants.

À Golf et aux parcelles assainies, les jeunes ont été plus déchaînés. Du croisement « pharmacie Golf » au rond point « Case ba » des foyers de tension sont notés un peu partout. Les jeunes manifestants ne se sont pas seulement contentés à barrer les routes. Ils se sont attaqués aux locaux des impôts et domaines de Pikine-Guédiawaye nichés à Fadia. Ils ont tout détruit. Les vitres sont cassées, des bureaux mis en feu, des ordinateurs pillés, bref tout le bâtiment est mis à sac. Les assaillants ont fait la loi pendant plusieurs heures sans être inquiétés par la police ni la gendarmerie. Les manifestations se sont prolongées tout au long de la route des niayes. Même la police des Parcelles assainies n’est pas épargnée. De tous les côtés, les pierres ont jailli, le feu flambe. Les policiers las de balancer des grenades lacrymogènes se terrent dans leur coin.

Sur la VDN et à Yoff, c’est le même décor. Des manifestations qui sèment le désordre, des gendarmes qui les pourchassent. Cependant, ils n’ont pu faire le poids face au nombre impressionnant de jeunes et de foyers de tension. Pendant que les forces de l’ordre cherchent à sécuriser la permanence du Parti démocratique Sénégalais (PDS au pouvoir), certains manifestants se sont dirigés au domicile du ministre de l’Élevage et maire de Yoff, Oumou Khairy Gueye Seck. Ils l’ont complètement pillé. Du salon à la chambre à couchée rien a été laissé en rade. Dans la cour, les stigmates sont effarants. Les vitres cassés, des brulures et des débris jonchent le sol. À Ouakam, les jeunes après avoir saccagé encore une fois l’agence de la Senelec, ils ont voulu s’en prendre au monument de la renaissance. Cependant, les gendarmes sont arrivés en renfort et les militaires sont venus leur prêter main forte. C’est seulement avec cette tactique qu’ils ont pu repousser la charge des jeunes manifestants déterminés à tout mettre sens dessous dessus en représailles aux nombreuses et longues coupures de courant.

Leur presse (Ibrahima Lissa Faye, PressAfrik), 28 juin 2011.

 

Dakar s’embrase, incendies et sacages

Quatre véhicules se consument au siège de la société nationale d’électricité d’une banlieue de Dakar après le passage de manifestants ulcérés par les coupures de courant, qui, dans la nuit de lundi à mardi, ont embrasé la capitale sénégalaise, saccageant des édifices publics.

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« Ils ont tout détruit », affirme un habitant debout devant le bâtiment de la Société nationale d’électricité (Sénélec) en flammes d’où s’échappe une épaisse fumée.

La voie qui mène vers ce quartier de la Patte d’Oie est jonchée de pierres et de restes de barricades. Tout autour, des pneus en feu et des éclats de vitres obstruent la chaussée.

Dans le quartier voisin des Parcelles assainies, la façade du bâtiment de la Sénélec est noircie par la fumée des flammes.

Sur la route de la banlieue populaire de Guédiawaye, une voiture calcinée git au milieu de la chaussée et contraint les automobilistes à faire des zig-zag hasardeux.

Au siège des services fiscaux de cette banlieue, saccagé et incendié, des badauds sont debout à l’entrée du bâtiment. Tables renversées, ordinateurs détruits, climatiseurs emportés, papiers éparpillés un peu partout dégoulinent de l’eau versée par les pompiers pour éteindre l’incendie allumé par les manifestants.

« Il y a eu une longue coupure qui a commencé à 07H00 (locales et GMT), vers 20H00, le courant n’était pas revenu et la casse a commencé. Les gens sont fatigués », affirme une femme.

Des employés du service sont venus regarder ce qui reste de leur lieu de travail.

« C’est un des plus importants services fiscaux de Dakar. Les manifestants ont emmené du matériel avec eux, dont un coffre-fort », explique un employé.

« Toute la ville s’est embrasée »

« Toutes les données du service ont été détruites. Il nous faudra longtemps pour les reconstituer, mais en attendant les manifestants nous ont mis en chômage technique », indique un autre employé.

« C’est toute la ville de Dakar qui s’est embrasée. Beaucoup de quartiers ont brûlé. Il faut que les autorités règlent ce problème de l’électricité », dit de son côté un policier en faction.

Selon des témoignages concordants, les policiers ne sont venus dans cette partie de la banlieue qu’après le passage des manifestants qui scandaient des slogans demandant le départ du président Abdoulaye Wade, 85 ans, au pouvoir depuis 11 ans et candidat à sa succession à la Présidentielle de février 2012.

À la mairie des Parcelles assainies, un groupe d’habitants était encore debout vers minuit devant le bâtiment municipal saccagé. Dans la cour, un véhicule de la mairie est complètement calciné.

Des embouteillages monstres se sont formés dans Dakar à cause de l’arrêt de la circulation imposée pendant des heures par les manifestants. « Ne prenez pas cette voie. Il y a des gens qui cassent tout sur leur passage devant », intime un conducteur à plusieurs automobilistes du quartier de Ouakam.

D’autres manifestations ont eu lieu dans d’autres villes comme Mbour, au sud de la capitale, où des groupes s’en sont pris également pris à la Sénélec.

Ces émeutes des délestages surviennent après des manifestations, le 23 juin, dans tout le pays, ayant tourné à l’émeute à Dakar où plusieurs édifices publics et domiciles de responsables du pouvoir ont été détruits.

Les manifestants s’opposaient à un projet de réforme constitutionnelle visant, dès février 2012, à élire en même temps un président et un vice-président avec un minimum de 25% des voix au premier tour.

Face à ces manifestations qui ont fait une centaine de blessés à Dakar, le président Wade a finalement retiré son projet qui était en discussion à l’Assemblée nationale.

Leur presse (Malick Rokhy Ba, Agence Faut Payer), 28 juin 2011.

 

Sénégal : Reprise des violences à Dakar

Des bâtiments publics ont été incendiés dans la capitale sénégalaise et des manifestations ont éclaté dans l’ouest du pays.

Après le président Abdoulaye Wade, au tour de la société nationale d’électricité (Sénélec) d’être la cible de la colère des Sénégalais. Si Wade avait su apaiser une situation explosive en renonçant à modifier la Constitution en sa faveur, de nouveaux troubles agitent actuellement l’ouest du pays en conséquence des coupures d’électricité qui paralysent fréquemment certaines régions. Plusieurs bâtiments publics ont été incendiés à Dakar, la capitale sénégalaise, dans la nuit de lundi à mardi.

Les locaux de la Sénélec sont particulièrement visés par des habitants excédés par les coupures d’électricité de plus en plus longues et fréquentes. La mairie du quartier des Parcelles assainies a également été saccagée et brûlée. Dans la banlieue de Pikine-Guiédawaye, c’est le siège des services fiscaux qui a été pris pour cible.

Manifestations spontanées

Plus tôt dans la soirée, des habitants de Mbour, ville côtière à 80km au sud de Dakar, sont descendus dans la rue pour manifester spontanément leur colère. Selon des témoins, ils étaient plusieurs milliers à s’être réunis pour protester contre les coupures d’électricité qui entravent l’activé économique du pays.

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Ces manifestations font suite aux émeutes qui ont secoué Dakar jeudi. Les opposants à Abdoulaye Wade contestaient alors sa réforme de la Constitution visant à permettre l’élection simultanée d’un président et d’un vice-président avec un minimum de 25% des voix au premier tour. La police avait recensé 102 blessés, dont 13 policiers. Si Wade a reculé sur ce sujet, il entend toujours se présenter pour sa réélection, à l’âge de 85 ans. Une aspiration qui continue de se heurter à l’opposition du mouvement du 23 juin, qui s’est constitué après les émeutes de la semaine dernière.

Leur presse (France Soir), 28 juin 2011.

 

Sénégal: les coupures d’électricité exacerbent la colère contre le pouvoir

La capitale sénégalaise Dakar s’est enflammée dans la nuit de lundi à mardi, des habitants exaspérés par les coupures d’électricité incendiant plusieurs bâtiments publics cinq jours après des manifestations contre le président Abdoulaye Wade, au pouvoir depuis 11 ans.

Le calme est revenu mardi matin, mais aucun bilan n’était disponible dans l’immédiat sur d’éventuels blessés ou arrestations.

La Société nationale d’électricité (Sénélec, publique) a été la principale cible des manifestants, qui ont aussi saccagé d’autres bâtiments publics.

Depuis cinq jours, dix des agences de la Sénélec ont été détruites à Dakar et ses banlieues, ainsi qu’à Keur Massar, Mbour et Thiès, villes situées à l’est de la capitale, a précisé à l’AFP un responsable de la société.

Jusqu’à tard dans la nuit, des habitants en colère, pour la plupart des jeunes, ont bloqué la circulation sur plusieurs axes routiers pendant plusieurs heures en érigeant des barricades.

Les premiers rassemblements, dès lundi après-midi dans différents quartiers, avaient été dispersés par des forces de l’ordre, sporadiquement contraintes à des courses-poursuites dans les rues.

« Maintenant, ça va. Mais dans la nuit, les enfants avaient allumé des feux partout » avec des pneus ou branchages, a dit à l’AFP Marie-Jeanne, mère de famille de Pikine (est).

Des vestiges de ces foyers étaient encore visibles sur plusieurs voies de la capitale mardi.

Des scènes d’émeutes similaires se sont produites lundi à Mbour, ville du littoral à environ 80 km au sud-est de Dakar, où les habitants ont affirmé être restés 48 heures sans électricité.

Selon des journaux privés et des médias en ligne, des « émeutes des délestages » ont également eu lieu lundi à Thiès (ouest), Mbacké et Kaolack (centre).

Le Sénégal est en proie à des coupures régulières d’électricité depuis des mois, qui se sont aggravées ces dernières semaines, durant parfois deux jours d’affilée dans certaines zones. Ces délestages, qui touchent la plupart des villes, ont un impact négatif sur l’activité économique, en particulier pour les petits commerces, très nombreux au Sénégal.

Dans un communiqué transmis mardi à l’AFP, la Sénélec explique faire « face depuis quelques jours à un déficit de production important qui entraîne de nombreux délestages », et présente ses excuses, se disant « consciente des nombreux désagréments occasionnés par la situation actuelle ».

Déjà confrontée à des difficultés financières pour s’approvisionner en carburant et entretenir un matériel souvent vieux, elle précise avoir enregistré « des pannes sur plusieurs machines vétustes ».

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Ces émeutes interviennent après des manifestations dans tout le pays, le 23 juin, provoquées par un projet du président Abdoulaye Wade visant à permettre, dès février 2012, l’élection simultanée d’un président et d’un vice-président avec un minimum de 25% des voix au premier tour.

À Dakar, alors que ce projet de loi controversé était discuté à l’Assemblée nationale, ces manifestations avaient tourné à l’émeute, faisant au total 102 blessés, dont 13 policiers selon la police.

Le président Wade, 85 ans, au pouvoir depuis 2000 et candidat à sa propre succession en 2012, avait finalement renoncé à faire voter le texte.

Mais l’opposition et la société civile, y compris les célèbres chanteurs Youssou Ndour et Didier Awadi, exigent désormais qu’il ne soit pas candidat à sa propre succession.

Mardi le quotidien privé Walfadjri titrait : « Émeutes de l’électricité : le courant ne passe plus entre Wade et le peuple ».

Leur presse (Agence Faut Payer), 28 juin 2011.

 

Saccages et incendies après des coupures d’électricité

Plusieurs bâtiments publics, notamment ceux de la société nationale d’électricité du Sénégal, ont été incendiés lundi 27 juin dans la soirée à Dakar et ses banlieues par des habitants excédés par les coupures d’électricité de plus en plus longues et fréquentes.

Dans le quartier de la Patte d’Oie, le bâtiment de la société nationale d’électricité (Sénélec) était en feu en fin de soirée, de même que quatre véhicules de l’entreprise garés dans la cour.

Dans le quartier des Parcelles Assainies, les locaux de la Sénélec étaient également en feu et les rues étaient jonchées de pierres et de débris, signe du passage de manifestants en colère qui n’étaient plus présents sur place, pas plus que les forces de l’ordre, selon la même source. La mairie de ce quartier a aussi été saccagée et brûlée.

« Toute la ville de Dakar s’est embrasée »

Dans la banlieue de Pikine-Guiédawaye, c’est le siège des services fiscaux qui a été totalement saccagé et incendié, a-t-il constaté. Les pompiers tentaient de maîtriser l’incendie.

Un policier présent sur les lieux a affirmé que les manifestants « ont tout emporté avec eux, y compris le coffre-fort ». Selon lui, « c’est tout la ville de Dakar qui s’est embrasée », avec des bâtiments de la Sénélec également incendiés dans les quartiers de Yembeul et de Daroukhane. Un peu partout dans la ville, des pneus incendiés étaient visibles.

La colère populaire dispersée

Plus tôt dans la journée de lundi, des manifestations de colère populaire contre la Sénelec s’étaient également produites à Mbour, ville du littoral située à environ 80 km au sud de Dakar.

Des forces de l’ordre étaient intervenues pour les disperser à coups de grenades lacrymogènes. Les protestataires s’étaient ensuite disséminés dans les quartiers, bloquant des voies, brûlant des pneus, et saccageant les locaux de la Sénelec.

« Tout est cassé à la Sénélec », ordinateurs et véhicules, a raconté un témoin en ajoutant que « les 27 quartiers de Mbour ont chacun leur foyer de tension ». Il a parlé d’« émeutes des délestages ».

102 blessés après une journée d’émeutes

Le Sénégal est en proie à des coupures régulières d’électricité depuis des mois, qui se sont aggravées ces dernières semaines, durant parfois deux jours d’affilée dans certaines zones. Ces « délestages », qui touchent la plupart des villes, ont un impact négatif sur l’activité économique, en particulier pour les petits commerces, très nombreux au Sénégal.

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Ces manifestations de colère sont intervenues quatre jours après une journée d’émeutes jeudi à Dakar, provoquée par un projet de loi du président Abdoulaye Wade visant à permettre, dès février 2012, l’élection simultanée d’un président et d’un vice-président avec un minimum de 25% des voix au premier tour.

La police avait indiqué avoir recensé au total 102 blessés, dont 13 policiers, lors des manifestations qui s’étaient déroulé alors que ce projet controversé était discuté à l’Assemblée nationale.

Le président Wade, 85 ans, au pouvoir depuis 11 ans, avait finalement décidé de renoncer à faire voter le texte en raison de ces manifestations à Dakar et d’autres villes du pays. Mais l’opposition et la société civile exigent désormais qu’il ne soit pas candidat à sa propre succession comme il en a exprimé l’intention.

Leur presse (Le Nouvel Observateur), 28 juin 2011.

 

Le Sénégal s’embrase

Quelques jours après les manifestations contre une réforme électorale finalement abandonnée, les Sénégalais sont redescendus dans la rue, cette fois-ci pour crier leur colère contre les coupures d’électricité à répétition et de plus en plus longues. La tension est montée d’un cran a Dakar et dans ses alentours.

Un climat électrique. Quatre jour après la journée de révolte contre le projet de réforme électorale proposée par le président Abdoulaye Wade — qui a fait machine arrière — Dakar et sa banlieue se sont embrasées lundi, au motif cette fois des coupures de courant de plus en plus récurrentes dans la capitale. Pour manifester leur colère, les Dakarois ont mis le feu à certains symboles de l’autorité publique, notamment les locaux de la société nationale d’électricité du Sénégal (Senelec), objet de leurs frustrations, mais aussi des mairies et autres bâtiments publics. Dans le détail, les bâtiments de la Senelec des quartiers de Yoff, de la Patte d’Oie  ou encore de Yeumbeul, ainsi que les mairies des deux derniers ont été incendiés, selon le quotidien sénégalais Walf Fadjiri. Les jeunes en colère contre ces délestages, particulièrement longs et fréquents ces trois derniers jours, ont envahi les rues de 15 heures à 21 heures, parfois armés, précise le journal. Des poubelles et véhicules ont également été enflammées, et des barricades érigées à partir de poteaux électriques endommagés, de gravats ou encore de pneus. Plus tôt dans la journée de lundi, des manifestations de colère populaire contre la Sénelec s’étaient également produites à Mbour, ville du littoral située à environ 80 kilomètres au sud de Dakar.

Des heurts ont éclaté entre jeunes et forces de l’ordre, les premiers jetant des pierres et les policiers — certains munis de lance-grenades — répliquant avec des bombes de gaz lacrymogène. Un des manifestants aurait été grièvement blessé à l’œil à Parcelles Assainies, toujours selon le quotidien. Selon le site Sud Online, des policiers lourdement armés, mais cachés sous des habits de civils, ont sévèrement réprimé les émeutes dans les quartiers de Sacré Cœur, Grand Dakar et Baobab. Mêmes informations dans les colonnes du Quotidien, qui affirme même les autorités d’avoir recours à la torture. Et l’organisation de défense des droits de l’Homme Raddho d’appeler le gouvernement du Sénégal au respect de ses engagements internationaux. « La torture est un crime en droit international. Elle fait l’objet d’une interdiction absolue et ne peut être justifiée par aucune circonstance », souligne l’ONG.

Un ras-le-bol général

« Nous n’en pouvons plus. On n’arrive plus à travailler correctement et depuis 2 heures du matin on n’a pas d’électricité. Les tailleurs, les menuisiers, personne ne travaille », a confié un Sénégalais à Sud Online. « Rien ne nous arrêtera si le courant ne revient pas, on n’a pas peur des policiers ni de Wade. On va continuer de descendre dans la rue », a prévenu un autre. Derrière ces motifs de mécontentement, ce peuple d’Afrique de l’Ouest dit sa colère contre la cherté de la vie, mais aussi les inondations ou encore la corruption. Confronté à la première insurrection de cette ampleur depuis son arrivée au pouvoir en 2000, Abdoulaye Wade a dû renoncer la semaine dernière à son projet de créer un poste de vice-président — une mesure considérée comme une manœuvre du président pour pérenniser son fils Karim, déjà « super ministre » d’État, de la Coopération et des Transports, et chargé du quart du budget de l’État, au pouvoir. La réforme prévoyait également l’abaissement de 50% à 25% des suffrages le seuil nécessaire pour être élu président dès le premier tour de scrutin — ce qui aurait pu favoriser sa réélection en 2012, sachant que la Constitution lui interdit en principe de se présenter pour un troisième mandat consécutif, mais qu’il estime qu’il en a le droit, la nouvelle loi fondamentale n’étant entrée en vigueur qu’en 2001.

Leur presse (Marie Desnos, Parismatch.com), 28 juin 2011.

 

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Le ticket de Wade met le feu au Sénégal
Les manifestations ont tourné ce jeudi à l’émeute faisant plusieurs blessés

En voulant imposer son projet de loi instituant « le ticket de l’élection simultanée au suffrage universel du président et du vice-président de la République » et le très contesté « quart bloquant », disposition permettant d’être élu dès le premier tour avec seulement 25% des voix, Abdoulaye Wade a plongé son pays dans le chaos. Un projet de loi finalement abandonné en fin de journée. Reportage.

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En titrant « Le jour de tous les dangers », le quotidien Rewmi ne s’est pas trompé. Des heurts d’une rare violence ont éclaté un peu partout dans le centre-ville de Dakar, mais également à Thiès, Saint-Louis, Louga, Ziguinchor ou Diourbel, ce jeudi alors que les députés examinaient le projet de loi instituant « le ticket présidentiel ». Soumis au Parlement en procédure d’urgence, ce projet de réforme de la Constitution suscite la colère des populations depuis son adoption en conseil des ministres la semaine dernière. Dans sa version initiale, le projet prévoyait « l’élection simultanée au suffrage universel du président et du vice-président de la République » et instaurait un « quart bloquant », permettant au ticket arrivé en tête au premier tour d’être élu directement avec un minimum de 25% des voix. Le projet envisageait également qu’en « cas de démission, d’empêchement définitif ou de décès en cours de mandat », le président de la République serait remplacé par le vice-président qui, en tant que nouveau chef de l’Etat, pourrait nommer et révoquer un nouveau vice-président. Beaucoup soupçonnent le président Wade, 85 ans et candidat à sa propre succession, de vouloir se faire réélire, avec un minimum de voix, pour ensuite céder le fauteuil à son fils, Karim Wade, qui l’accompagnait récemment à Deauville au G8 ou en Libye.

L’opposition et la société civile ont immédiatement réclamé le retrait du projet de loi mais, la majorité présidentielle est restée sourde aux critiques allant même jusqu’à affirmer que ce ticket constituait « une avancée démocratique ». Dans la journée d’hier, des jeunes ont manifesté leur raz-le-bol place de l’Indépendance à Dakar, à Pikine, une banlieue de la capitale, ou à Kaolack dans le centre du pays. Des manifestations sévèrement réprimées. Ce jeudi, c’est pratiquement tout le pays qui a plongé dans la violence. Un bilan reste pour l’instant difficile à établir. L’Agence France-Presse (AFP) décompte au moins six blessés aux abords ou à l’intérieur de l’Assemblée : un gendarme, un policier et quatre manifestants. L’Agence de presse sénégalaise (APS, officielle), rapporte de son côté dix blessés. Mais, ce bilan pourrait s’alourdir et plusieurs médias sénégalais évoquent un mort, tué par balles près du marché Sandaga.

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L’Assemblée nationale en état de siège

Tôt dans la matinée, plusieurs milliers d’opposants à la réforme s’étaient donné rendez-vous devant les grilles de l’Assemblée nationale, où près de 90% des députés appartiennent à la mouvance présidentielle suite au boycott de l’opposition lors des dernières législatives. À leur arrivée, les rares députés issus des rangs de l’opposition ont été acclamés par la foule alors que les députés libéraux étaient conspués. Chargé de propagande du parti démocratique sénégalais (PDS, au pouvoir), Farba Senghor, proche parmi les proches de la famille Wade, a lui essuyé des jets de pierre alors qu’il effectuait un « tour d’honneur » de la place Soweto en provoquant la foule le poing brandi. Une attitude qu’il payera cher puisque, plus tard dans la journée, des jeunes survoltés incendieront une de ses maisons et les six véhicules garés devant…

Peu après l’ouverture de la séance plénière, le ministre de la Justice, Cheikh Tidiane Sy, espére sans doute éteindre l’incendie en annonçant le recul du président Wade sur le quart bloquant. Une prise de parole trop tardive, le feu couve déjà. « Je voudrais informer votre auguste Assemblée que le président de la République m’a demandé d’introduire un certain nombre d’amendements qui portent sur les conditions d’éligibilité des tickets lors de l’élection présidentielle, déclare ainsi le ministre aux députés alors que les tirs de gaz lacrymogènes et les canons à eau résonnent déjà à l’extérieur de l’hémicycle. Un amendement porte essentiellement sur le maintien de l’article 33 de notre Constitution. » Un article qui stipule que « nul n’est élu au premier tour s’il n’a obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés » et que « si aucun candidat n’a obtenu la majorité requise, il est procédé à un second tour de scrutin ».

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« Une initiative insensée et dangereuse »

À l’extérieur, les ténors de la principale coalition d’opposition et les leaders de la société civile, unis comme jamais, sont tous là à quelques rares exceptions dont Macky Sall. Moustapha Niasse, Bara Tall, Serigne Mansour Sy Djamil, Abdoulaye Bathily, Amath Dansokho, le parvis de l’Assemblée nationale n’a jamais, si ce n’est peut-être en 1962, était l’enjeu d’une telle lutte dans l’histoire du Sénégal… « Libérez le pays ! », scandent les manifestants à chaque fois qu’arrive un des principaux opposants. « Cette initiative est totalement insensée et dangereuse. C’est un recul de notre démocratie, estime Ousmane Tanor Dieng, le premier secrétaire du parti socialiste. Ce que nous réclamons aujourd’hui, ce n’est plus le retrait de la loi, c’est le retrait d’Abdoulaye Wade lui-même ! » « Au-delà de cette loi inique, le mot d’ordre est de faire dégager Wade », confirme sa camarade Aïssata Tall Sall, maire de Podor. « Honte aux députés qui vont voter cette loi ! », lance de son côté l’historienne Penda Mbow avant de poursuivre : « Aujourd’hui, nous saurons si la démocratie va vivre ou s’éteindra à jamais dans notre pays ». Même Youssou Ndour, très discret d’habitude en ce qui concerne la chose politique, s’est publiquement opposé à ce projet de loi dans un communiqué publié depuis l’étranger en dénonçant « une forfaiture » qui « hypothèque l’avenir du pays ».

Rapidement, les barrières de sécurité cèdent face à la pression de la foule et la manifestation, qui se déroulait jusque-là dans le calme, dégénère. Vers 10h, n’arrivant plus à contenir les manifestants, les forces de l’ordre tentent de les disperser à coups de grenades lacrymogènes. Surchauffée, une partie des manifestants répond par des jets de pierre. Pendant plus d’une heure, les affrontements entre jeunes et policiers anti-émeutes se poursuivent autour de l’Assemblée nationale avant de se propager dans le centre-ville et notamment vers la place de l’Indépendance et le marché Sandaga. Des édifices gouvernementaux sont saccagés dont le ministère de l’Industrie et des mines et celui des Droits humains. La Radio télévision sénégalaise (RTS) fait également les frais de la rage des manifestants. Barrages de fortune, poubelles incendiées, pneus brûlés, carcasses de voiture calcinées, bris de verre, le quartier du Plateau se souviendra longtemps de ce déchaînement de violence.

« Si Wade ne recule pas, il ne pourra plus gouverner ce pays, lâche Abdoulaye, observant incrédule les évènements depuis la porte de son bureau, situé à deux pas de l’Assemblée. Il a vraiment dépassé les limites. » « Je ne peux pas comprendre qu’il cherche à chaque fois à tripatouiller la constitution et à placer son fils, poursuit Léon, un collègue. Trop c’est trop, qu’il nous laisse en paix ! » Militant au PDS depuis 1999, le fonctionnaire avoue avoir « honte d’avoir défendu cet homme » et prédit que « si Wade ne recule pas et ne renonce pas à un 3e mandat, il y aura une révolution à la tunisienne dans ce pays ».

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« Le pouvoir est dans la rue »

Croisé aux abords de l’Assemblée, Alioune Tine, président de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’homme (Raddho), à l’origine d’une campagne menée par la société civile et intitulée « Touche pas à ma constitution », observe le visage grave que « le pouvoir est dans la rue ». Pour lui, « Wade doit sortir de son silence et s’adresser à la nation ». Peu de temps après, la Raddho informe qu’Alioune Tine « a été blessé et admis aux urgences » à l’hôpital. D’après l’ONG, il se trouvait en compagnie de Cheikh Tidiane Gadio, ancien ministre des Affaires étrangères entré en dissidence, lorsqu’il a été attaqué par des présumés hommes de main d’un responsable du PDS.

Hier déjà dans un communiqué, les États-Unis s’étaient déclarés « préoccupés par le fait qu’une loi constitutionnelle, qui modifierait de façon aussi fondamentale le système utilisé pour élire le président du Sénégal depuis cinquante ans, ait été proposée sans faire l’objet d’un débat approfondi, significatif et ouvert » et confiaient craindre « un affaiblissement des institutions démocratiques ». La France, ancienne puissance coloniale, a elle attendu le début des violences ce jeudi pour se prononcer. « Sur la forme, on peut être surpris qu’une réforme aussi importante, présentée à moins d’un an d’une échéance électorale majeure, n’ait pas été précédée d’une large concertation avec l’ensemble des acteurs politiques du pays », a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Bernard Valéro, sans vouloir faire de commentaire sur le fond de la réforme.

En fin d’après-midi, les députés signifient leur refus de voter le projet de loi et suspendent la séance plénière. Les oreilles rivées à leurs radios et à leurs téléphones portables, les manifestants savourent et commencent à quitter la place Soweto. Vers 18h, Cheikh Tidiane Sy met fin au suspens et annonce le retrait du projet. « Le président a reçu des messages de partout et singulièrement de nos chefs religieux et c’est fort de cela qu’il m’a demandé de retirer ce projet de loi », explique-t-il aux députés. « C’est la victoire du peuple », se félicite dans le hall de l’Assemblée Me El Hadj Diouf, opposé depuis le départ au projet. Certains de ces collègues libéraux applaudissent eux « la sagesse » du chef de l’État qui a su les écouter. Reste à savoir ce que l’intéressé compte maintenant faire.

Leur presse (Simon Maro, Afrik.com), 23 juin 2011.

 

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Face à la colère de la rue, le président sénégalais renonce à réformer la Constitution

Face à la colère de la rue, le président sénégalais, Abdoulaye Wade, a renoncé in extremis, jeudi 23 juin, à son projet controversé de réforme constitutionnelle qui devait assurer son élection et le passage du pouvoir à son fils après son départ, a annoncé aux députés son ministre de la justice, Cheikh Tidiane Sy.

Cette réforme de la Constitution devait abaisser à 25 % le seuil minimum des voix nécessaires au premier tour pour élire un « ticket présidentiel » comprenant un président et un vice-président et ainsi assurer le maintien au pouvoir de Wade père et fils.

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M. Sy a annoncé le retrait de cette mesure aux députés peu après l’ouverture de la séance plénière où elle devait être adoptée. Le président Wade « a pris en considération vos préoccupations » et « a pris bonne note » de toutes les réactions, « il m’a chargé de retirer ce projet de loi », a déclaré le ministre, l’air grave, suscitant des applaudissements nourris. Au même moment, l’hémicycle résonnait de temps à autre de tirs de gaz lacrymogènes et de canons à eau contre des manifestants qui jetaient des pierres à l’extérieur de l’Assemblée.

Entre un et plusieurs milliers de personnes, selon différentes estimations, avaient pris position devant le portail de l’Assemblée, dans un face à face tendu avec des policiers anti-émeutes. Les affrontements avaient cessé en fin d’après-midi, laissant place à un rassemblement.

UNE DIZAINE DE BLESSÉS

Ces heurts ont fait au moins dix blessés, « dont un officier de police », selon l’Agence de presse sénégalaise. Un journaliste de l’AFP a vu un gendarme en sang, blessé par un projectile. L’ambassade de France avait invité les Français à limiter leurs déplacements en raison « des manifestations de protestation ou de soutien au projet de réforme constitutionnelle » qui « sont à prévoir aujourd’hui, 23 juin, à Dakar comme en province ».

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Jeudi, la France s’est dite « surprise » que cette réforme constitutionnelle « n’ait pas été précédée d’une large concertation ». « Sur la forme, on peut être surpris qu’une réforme aussi importante, présentée à moins d’un an d’une échéance électorale majeure, n’ait pas été précédée d’une large concertation avec l’ensemble des acteurs politiques du pays », a déclaré le porte-parole du ministère des affaires étrangères français, Bernard Valero, sans vouloir faire de commentaire sur le fond de la réforme.

L’affaire du « ticket présidentiel » a enflammé la rue sénégalaise et diverses composantes de la société : jeunes, syndicats, opposition, société civile… Des manifestations, réprimées, ont eu lieu mercredi dans différentes villes comme Kaolack (Centre), Ziguinchor (Sud) et Dakar. Dans la capitale, des groupes de jeunes avaient été violemment dispersés par les forces de l’ordre, qui ont interpellé un nombre indéterminé de personnes. Parmi celles-ci figurent deux rappeurs, dirigeant le mouvement Y en a marre, engagé contre les « injustices » du régime d’Abdoulaye Wade, 85 ans, au pouvoir depuis 2000.

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Le chanteur Youssou N’Dour est sorti de sa réserve en dénonçant « une forfaiture » qui « hypothèque l’avenir du pays ». Les États-Unis se sont déclarés « préoccupés », tout comme l’Union européenne, par une réforme qui risque d’« affaiblir les institutions démocratiques du Sénégal ».

Leur presse (Le Monde.fr), 23 juin 2011.

 

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Sénégal : Tensions à Dakar

À la veille de l’examen par l’Assemblée nationale d’un projet de loi visant à élire simultanément à compter de 2012 un président et un vice-président au Sénégal, un texte dénoncé par opposition et société civile, la tension est montée dans les rues de Dakar.

Les rues de Dakar se sont remplies en quelques heures, jeudi après-midi. La tension et les violences ont fait leur apparition malgré les appels au calme d’Abdoulaye Wade, le président sénégalais. Mais ce regain de tension, l’homme en est la cause. À 85 ans, il souhaitait installer son fils Karim, au pouvoir. Comment ? L’Assemblée nationale devait examiner un projet de loi visant à élire simultanément à compter de 2012 un président et un vice-président. Un texte très critiqué par l’opposition. Selon elle et une majeure partie de la société civile, cette nouvelle loi était une manoeuvre du président, au pouvoir depuis 2000 et réélu en 2007 pour cinq ans, de supprimer le second tour en permettant à un candidat d’être élu s’il arrive en tête au premier tour du scrutin avec le quart des suffrages exprimés. Mais ce projet est enterré… ou presque.

Jeudi dans la soirée, le président sénégalais Abdoulaye Wade a renoncé à l’intégralité de son projet de réforme électorale, y compris la disposition prévoyant la création d’un poste de vice-président. L’annonce est venue du ministre de la Justice devant le parlement.

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Une décision qui n’a pas calmé la foule pour autant. La police sénégalaise a  en effet violemment réprimé une manifestation spontanée de jeunes qui protestaient contre ce projet de loi. Des éléments de la police anti-émeutes, avec casques et boucliers, ont dispersé à coups de grenades lacrymogènes un rassemblement de quelques dizaines de personnes sur la Place de l’Indépendance, dans le centre-ville de Dakar. Plusieurs jeunes ont été arrêtés, battus et embarqués dans un car de police vers une destination inconnue.

Ces jeunes s’étaient auparavant attaqués avec des pierres aux cars de la police stationnés sur cette place centrale de la capitale alors que les policiers tentaient de les repousser avec des grenades lacrymogènes. Une conférence de l’opposition et de la société civile qui était organisée à Dakar a dégénéré quand des jeunes ont demandé aux organisateurs de « cesser les paroles et les bavardages pour des actions », a déclaré à la presse Dialo Diop, un responsable de la principale coalition de l’opposition.

De nombreuses personnes auraient été blessées dans les violences dont Alioune Tine, président de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l’Homme (Raddho, ONG). D’après des témoins appartenant à une ONG et selon le Parisien, son véhicule a été attaqué par des individus présumés proches du parti présidentiel. Il a été blessé et hospitalisé. Ce vendredi matin, les rues de Dakar avaient retrouvé le calme.

Leur presse (France Soir), 24 juin 2011.

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